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cinema - Page 21

  • Welcome to New York - Le film de Ferrara

    J’ai vu le sulfureux film de Ferrara  “ Welcome to New York”. Certes, sur le plan cinématographique, on sent le manque de moyens, c’est souvent mal éclairé et pas toujours très bien ficelé, mais le procès qui en est fait, et le refus d’une certaine élite de le diffuser, est bien plus scandaleux que le film lui-même, qui pose bien davantage de questions que de nombreux navets ou de scénarios consensuels, censés endormir  le bon public, comme « qu’est ce qu’on a fait au bon Dieu »

    Wecome to New York se divise en trois parties :

    Dans la première partie, pas toujours réussie, mais nécessaire, qui dure environ 30 minutes, on assiste aux exploits sexuels et  aux partouzes endiablées d’un Devereaux, grand dirigeant international de banque, qui utilise son pouvoir pour satisfaire ses nombreuses et mystérieuses pulsions. Depardieu qui incarne le personnage, dit dans le prologue, qu’il n’aime pas celui qui envisageait de devenir Président. Du coup, il ne s’économise pas, pour nous construire une image assez infecte du héros, une sorte de bête de sexe,  entourée d’une bande de fêtards assez glauques, tout excités à l’idée de partager l’intimité d’un tel puissant.

    La seconde partie retrace l’épisode policier et judiciaire, de la chambre d’hôtel à la prison. On n'apprend rien de particulier, on se remémore des détails que la presse de l’époque n’avait pas manqués de nous rapporter sur cette affaire du Sofitel  Là encore, Ferrara appuie là où cela fait mal, à savoir l’arrogance du français qui tente en permanence d’utiliser sa position sociale pour échapper aux turpitudes du monde peu accueillant des univers carcéraux.

    La troisième partie, la plus longue, la moitié de la durée du film en gros, nous fait assister à un huis clos, entre Simone, la femme et DD (Depardieu Devereaux) assigné à résidence, à l’intérieur de l’immense appartement new yorkais, où le couple doit se retrouver face à face. C’est de très loin la séquence la plus réussie et la plus intéressante.  On est témoin des conflits entre DD et Simone, cette dernière reprochant à son "immature" de mari d’avoir cassé l’avenir brillantissime  qu’elle avait cherché à construire. La défense de DD est une charge contre le fric,  contre l’incompréhension et la manipulation de son épouse. De très bonnes questions sont posées, comme est-il plus moral d’amasser autant de pognon par héritage, lié à la simple spéculation sur des œuvres d’art,  que de vouloir vivre ses instincts comme il l’entendait ? Evidemment, ce passage a fait hurler les loups qui ont vu là une charge antisémite, pourtant, sans aucune stigmatisation, on peut quand même s’interroger sur  ces pratiques qu'une gauche aisée veut préserver au nom de la culture, pratiques qui ne font pas honneur à l’égalité de tous face à l’ascension sociale ou face à la justice,  et sur l’immense fortune d’un collectionneur de tableaux, dont la vente d’une seule pièce de Monet ou de Picasso a servi a payer la caution et la magistrale note de frais de cette affaire. On rappellera au passage que le grand marchand de tableaux Kahnweiler disait de Paul Rosenberg que c'était un "brocanteur" et qu'il n'a jamais rien compris à l'histoire de l'art, thèse en totale contradiction avec le livre d'Anne Sinclair sur ses origines familiales...par contre, Kahnweiler reconnaissait à Rosenberg, un flair du marché hors du commun....où se trouve la vérité , messieurs les historiens ????

    DD s'explique  également sur ses doutes, sur son engagement politique,  se sentant finalement désormais libre, ne s’étant jamais imaginé capable de se faire élire Président pour changer un monde auquel il ne croit plus et n’étant pas mécontent, d’avoir trouvé une issue,  quelle qu’elle soit, à un chemin de croix élyséen orchestré par Simone / Anne S.  et ses « amis »  de la caste politico-médiatique des intouchables.

    On retiendra également une série de dialogues houleux entre DD et son thérapeute,  nous ramenant  à la censure morale et à ce désir de normalité, qui pousse nos sociétés peu courageuses  à tout niveler, et où la petite bourgeoisie  paumée rejoint la grande qui a réussie, pour fuir toute remise en question, ayant bien trop peur de sa chute et de la dépression,  préférant engloutir des médicaments ou courir chez le psy : « Au secours docteur, aidez moi vite, je suis lucide sur moi-même et c’est insupportable ».

    Eh, oui, en France, on n’aime pas bien regarder les choses telles qu’elles sont, on préfère transmettre de belles histoires, qui finissent bien, ou se la raconter sur les belles valeurs de nos fondations, tellement revisitées et storyfiées, qu'elles sont prêtes à crouler….on cherche à éviter toute véritable mise à plat et toute comparaison avec nos proches voisins, pour ne surtout rien changer en profondeur…enfin, les plus anciennes générations, car les jeunes, eux, ce genre de film ne les choque pas du tout…nos gosses sont peut être plus adultes que leurs ainés, des grands ados, qui souvent n’ont pas vécu grand-chose d’important et cherchent à justifier leur injustifiable position protégée, pour finir leur petite vie pépère avec leur retraite, dorée ou effet dorure, pompée sur la collectivité condamnée à se paupériser à petit feu…