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  • Les chandans

     

    Le 18 et le 25 septembre, on pourra voir sur Arte une série policière réalisée par Bruno Dumont tournée dans le Pas de Calais, une sorte de comédie très ancrée dans le local, avec une galerie de personnages haut en couleurs.

     Je connais très bien Boulogne sur mer et ses environs, où ont été tournées la série et la plupart des films de Bruno Dumont, qui vit là bas. Les Cahiers du Cinéma de septembre y consacrent un long article ce mois-ci, et leur peur, c’est que la peinture de cette faune de province qui parle comme cha, comme dans les films de Dany Boon, qui marche un peu comme des robots, et qui est souvent complètement à l’ouest, ne crachant pas sur la bouteille, ne soit pas perçue avec la tendresse nécessaire, mais au contraire, donne à rire au petit cénacle parisien, qui ne loupe pas une occasion pour vanner des chandants, entre deux « boards » sur le taux de croissance …pourtant, il faudrait  nous interroger sur « comment on fait, à l’heure de la mondialisation, pour faire vivre ces régions », dont la majorité de la population est condamnée à terme en toute logique, à ne jamais retrouver d’emploi. Là bas, les MOOCs (prononcer mouch), ce sont des p’tites bêtes noires qui viennent su’ch’beurre en été, pas des systèmes d’enseignement à distance…

     On me dira : à l’époque de nos grands pères, il y avait bien des bourgeois qui se lavaient dans des salles de bains et qui mangeaient du foie gras, alors que les paysans bouffaient des patates et se lavaient au puits à l’eau glacée, et finalement, on a mis plus ou moins au travail tout le monde. Sauf qu’avec les machines et la puissance des ordinateurs, on n’aura bientôt plus besoin d’emplois non « sur qualifiés ».

     Si mon grand père, qui s'est niqué les poumons à faire Paris Calais en machine à vapeur, et qui, justement était issu de cette région, vivait encore, il me dirait sûrement avec son accent ch’ti, quelque chose du genre, «Lâche tin machin,  té vas  devenir maboule à force d’faire tourner tin cherveau…tiens, minge plutôt ch’fraises, mi, ch’sais pas faire marcher t’nordinateur, mais ché qu’mes fraises é zont pas pris l’avion et qu’ti, je te vois pas souvent r’tirer l’herbe dans min gardin »

     Le problème, c’est que là haut, même si mon grand père est mort depuis cinquante ans, c’est le genre de phrases qu’on peut entendre encore, y compris chez des gens assez jeunes ou comme j’imagine, dans la série très réaliste de Bruno Dumont….pourquoi de pas laisser vivre les gens comme ile l'entendent, avec des légumes du jardin plutôt qu'achetés par des traders sur des markets places, avec des brocantes où on recycle plutôt que de courir toujours après le dernier smartphone sorti  ?

     Nos politiques et les frondeurs, ils savent, quand ils quittent les troquets branchés du quartier des Invalides et de l’Assemblée nationale, que la vie n’est pas vraiment la même dans leur région, surtout s’ils viennent de villes moyennes et défavorisées…sauf qu’ils pensent qu’ils peuvent, par l’éducation nationale, par je ne sais qu’elle mesure ou promesse, en se débattant comme des sarkozys, ou en déshabillant Pierre pour habiller Paul avec des impôts, rétablir une sorte d’équilibre…pire, Attali et ses potes généticiens qui se disent socialistes, pensent que les inégalités entre individus étant majoritairement d’origine génétique, il suffira bientôt de greffer quelques machins dans l’ADN pour réparer les désordres et coller tout le monde à niveau, comme on répare une bagnole quand le radiateur a des faiblesses… A quand le contrôle technique obligatoire pour le cerveau des français…

     La question de fond, c’est que tout le monde ne pense pas de la même manière et ne veut pas du même monde.

     On est peut être à la veille d’une révolution ou à la veille de l’arrivée au pouvoir de la grande blonde…sauf, que la révolution est quand même passée par la Terreur et qu’elle n’était peut être pas si nécessaire qu’on veut bien le dire.

     Ce qu’il faut faire….je ne sais pas…on en parle fin septembre, après avoir vu « p’tit quinquin » sur Arte