Le Guardian ce WE consacre un article à Luc Sante, un écrivain belge peu connu à mon avis en France, amoureux de la photographie et de Doisneau, qui a longtemps vécu à New York, et qui vient de publier un livre assez nostalgique « Other Paris ».
Pour lui, Paris a longtemps été un antidote à l’Amérique, une ville « où vous pouviez boire jusqu’au bout de la nuit, sans choquer personne, l’Amérique ayant toujours cette retenue puritaine et calviniste ». Pourtant, aujourd’hui, pour beaucoup d’américains, Paris est un magazine de luxe, avec sa gastronomie, ses caniches, ses fioritures Belle Epoque, ses massifs d’art topiaire et ses intérieurs shabby chic.
Sante part en guerre contre cette vision anglo-saxonne, vendue par les agences de voyages. Nostalgique de la culture populaire chère à Jean Paul Clébert, cet écrivain qui a vécu près des clochards parisiens dans les années 50, Sante évoque également Robert Giraud, lui aussi proche des clochards, ami de Doisneau, de Prévert et de Cendrars, un poète qui n’a jamais voulu s’élever pour rester proche du peuple parisien et Louis Chevalier, démographe et historien, qui a consacré une grande partie de sa vie à étudier les classes laborieuses et dangereuses à Paris.
Sante veut rappeler à tous ses compatriotes, qui croyaient que Paris étaient la capitale du libéralisme, qui ont maintenant peur d’aller en France depuis les attentats de 2015 et qui voient notre pays sombrer dans le vote FN, que Paris n’a jamais compté autant de pauvres, d’emplois précaires, de sans abris et que l’argent a peut être tué une partie de la ville, mais qu’il y a toujours l’âme impertinente et révolutionnaire, avec ses cafés où l’on peut toujours parler à des inconnus et retrouver cet esprit, qui a traversé bonapartisme, pétainisme, racisme anti algérien, et qui, pour Sante finira bien par venir à bout des tentations fascistes, même si pour lui, l’argent est un fléau bien plus difficile à vaincre que le terrorisme.
"Snobisme inverse, nostalgie de la boue, l'esthétique de la tête en bas est lui-même un produit d'un certain raffinement de la pensée, de l'éducation bourgeoise de Sante" Le New York Times qui s'exprimait en fin d'année sur le même livre, ne faisait pas tout à fait les mêmes louanges de l'auteur, à qui il reconnaissait toutefois de grandes qualités, fournissant dans "Other Paris" une mine d'informations, avec un angle décalé qui ne manque pas de charme et d'originalité.