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  • Morin, l'anti-care

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    Il sort aujourd'hui le dernier livre d'Edgar Morin...je ne l'ai pas lu, mais j'ai écouté ce matin France Culture, où il était invité et j'ai lu quelques articles sur ce livre. Il dit bien les choses, Edgar, sur la crise de la gauche, sur son évolution ou plutôt sa régression. Je le cite "

    Plus grave encore est la disparition du peuple de gauche. Ce peuple, formé par la tradition issue de 1789, réactualisée par la IIIe République, a été cultivé aux idées humanistes par les instituteurs, par les écoles de formation socialistes, puis communistes, lesquelles enseignaient la fraternité internationaliste et l'aspiration à un monde meilleur. Le combat contre l'exploitation des travailleurs, l'accueil de l'immigré, la défense des faibles, le souci de la justice sociale, tout cela a nourri pendant un siècle le peuple de gauche, et la Résistance sous l'Occupation a régénéré le message.

    Mais la dégradation de la mission de l'instituteur, la sclérose des partis de gauche, la décadence des syndicats ont cessé de nourrir d'idéologie émancipatrice un peuple de gauche dont les derniers représentants, âgés, vont disparaître. Reste la gauche bobo et la gauche caviar. Et alors racisme et xénophobie, qui chez les travailleurs votant à gauche ne s'exprimaient que dans le privé, rentrent dans la sphère politique et amènent à voter désormais Jean-Marie Le Pen. Une France réactionnaire reléguée au second rang au XXe siècle, sauf durant Vichy, arrive au premier rang, racornie, chauvine, souverainiste."

    et encore :

    "La démocratie parlementaire, si nécessaire soit-elle, est insuffisante. Il faudrait concevoir et proposer les modes d'une démocratie participative, notamment aux échelles locales. Il serait utile en même temps de favoriser un réveil citoyen, qui lui-même est inséparable d'une régénération de la pensée politique, ainsi que de la formation des militants aux grands problèmes. Il serait également utile de multiplier les universités populaires qui offriraient aux citoyens initiation aux sciences politiques, sociologiques, économiques."

    "Il ne s'agit pas de concevoir un "modèle de société" (qui ne pourrait qu'être statique dans un monde dynamique), voire de chercher quelque oxygène dans l'idée d'utopie. Il nous faut élaborer une Voie, qui ne pourra se former que de la confluence de multiples voies réformatrices, et qui amènerait, s'il n'est pas trop tard, la décomposition de la course folle et suicidaire qui nous conduit aux abîmes."

    Edgar Morin évoque aussi la société du care de la moue- care Martine Aubry (pourquoi aller chercher ce mot d'une autre langue, pour faire djeun), alors que le terme fraternité serait si important à revaloriser, car si l'on sait agir pour défendre les libertés ou rendre une société plus égale, la notion de fraternité est infiniment plus complexe à véhiculer. Bref, Edgar nous redonne espoir en croyant à l'imprévu, ce qui fait que l'histoire change de sens alors que personne ne l'imaginait...en tous cas, Morin est tellement agréable à écouter ou à lire que c'est déjà une bonne chose en soi, pour une fois que quelqu'un a un regard lucide et intelligent sur la crise ...