Une France à deux vitesses...depuis de nombreux mois, j'aborde ce thème dans ce blog, vivant moi même partagé entre deux univers, celui de ma vie de cadre en retraite à Paris et celui qui passe une semaine par mois à Boulogne sur mer, l'une des communes les plus défavorisées du pays.
La lecture de la Voix du nord, les échanges avec les locaux, les déclarations des politiques même, de Aubry à Cuvillier, qui sont quoi qu'on en dise assez lucides sur leur environnement, me renforcent dans cette idée que les deux mondes, ceux qui ont inclus la mondialisation à Lille ou en région parisienne, les branchés, les connectés, les nomades, que je côtoie aussi par ailleurs, les bobos pour faire simple, et ceux qui n'y arriveront jamais, soyons clairs, pour mille raisons, maîtrisant déjà difficilement le français, largués sur le plan technologique et peu volontaires pour rentrer dans le système, sont appelés à cheminer sur des modèles économiques différents.
On peut rêver qu'on va ponctionner A pour renforcer B, qu'on va faire revenir l'emploi pour tous, qu'on peut déshabiller les moyens alloués aux meilleures écoles pour les donner aux zones d'éducation prioritaires comme le propose la ministre, qu'on peut taxer, imposer patrimoine, revenus à la source ou réduire les salaires des plus riches pour financer les acquis sociaux des plus pauvres, cela ne tient pas la route, ce n'est pas réaliste et c'est un peu trop simpliste. Et puis parce que c'est injuste, pour un chef d'entreprise qui parfois a sacrifié jusqu' sa santé pour sa boite, j'en connais, pour quelqu'un qui a trimé 10 à 12 heures par jour pour s'en sortir, qui n'a pas hésité à s'éloigner parfois de sa famille pour bosser ou pour un spécialiste en médecine qui finit par réduire ses horaires et fermer sa porte tant il en a marre d'être stigmatisé et insulté dans son cabinet....il y a un moment où ça suffit, surtout face à des syndicats qui ne veulent souvent rien lâcher, des indemnités chômage au contrat unique de travail, face à des ouvriers qui bossent au noir pour échapper aux prélèvements, face à des fonctionnaires protégés qui refusent d'en faire trop pour avoir du temps pour eux, alors museau bonhomme, avec tes leçons de morale sur l'unité, ta solidarité, ta fierté d'exploité et tes théories sur le partage des richesses.
On peut pousser le bouchon encore plus loin...Emmanuel Carrère dans son dernier bouquin où il s'interroge sur le catholicisme, se demande à demi mot ce qu'est donc ce Royaume de Dieu dans lequel sont exclus les riches et les intelligents...la réponse qui consiste à dire « tu n'as qu'à mettre ton intelligence au service des plus pauvres et donner ta richesse, alors tu connaîtras la Lumière », est un peu facile...comme dirait l'écrivain dans ses interviews, il y a là dedans une demande qui me paraît quasi inhumaine et une exclusion déclarée qui ne fait pas envie...et puis, les cathos quand on voit le temps qu'ils passent à palabrer sur l'homosexualité et l'accueil des divorcés, ils ne donnent pas l'image de l'Amour avec un A et de l'ouverture qu'ils prônent à tout va.
Alors, on fait quoi ? On négocie, on pose la question clairement, on arrête de tourner autour du pot...d'un côté comme de l'autre, on cesse de faire l'autruche, on stoppe le rapport de force, il faut penser à la mise en place de deux économies, avec des passerelles, en essayant de laisser de l'espoir et du désir aux uns et aux autres...ce n'est pas simple ? Non, mais c'est l'un des nombreux défis qui devrait nous mobiliser...peut être, on peut avoir deux monnaies...on a bien eu écu et franc juste avant l'euro...faut être créatif, peut être c'est idiot, mais en tous cas, il faut chercher d'autres pistes...