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  • Neruda le film...

    Certains ont admiré le grand poète communiste Pablo Neruda, jusqu’à le considérer presque comme une icône, genre Jean Ferrat et sa complainte…le film qui vient de sortir, qui retrace un court épisode de son histoire, ne fait pourtant pas vraiment de cadeau au personnage un peu ridicule, avec ses allures de Capitaine Haddock à casquette, fuyant son pays, sans jamais abandonner sa boulimie d’écriture.
    Neruda apparait ici peu sympathique à mes yeux, inventant en permanence sa vie et celle des autres, avec une grande brillance dans son écriture, au point d’être capable de rendre poignante et attachante la vie de ses pires ennemis…
    Néruda touche à l’imposture, et c’est cela le grand mérite du film, que de mettre en évidence cet aspect des choses, décrivant dans le détail les états d’âme d’une classe opprimée, alors qu’il ne vit pas vraiment comme les pauvres gens qui ramassent la merde ou comme les prostituées qu’il se complaisait à fréquenter, malgré ses liens officiels avec une femme, qui fut surtout son meilleur soutien, voire son tremplin vers la gloire…
    Aimant le luxe, les alcools couteux, se drapant dans des costumes de soie, macho, égoïste, polygame et complètement mégalo, Pablo écrit de beaux textes, mais manier la plume, avec le succès international qu’on connait (et la protection politique sous entendue qui va avec), est bien moins oppressant que d’être soumis à l’indifférence et à la solitude de la classe ouvrière.
    Le film me rappelle les conversations, entre l’écrivain communiste italien Antonio Gramsci et Pierre Bourdieu, deux intellectuels issus du prolétariat, sur le rôle de l’intellectuel. Pour Bourdieu, un intellectuel est toujours un peu un bourgeois, car il a le pouvoir de s’exprimer, ce que n’a pas un être embourbé dans la soumission, même si l'intellectuel partage leur vie et si lui-même se sent asservi. Bourdieu voyait même cela comme un mythe dangereux, l’identification au plus démunis n’étant rien d’autre qu’un jeu de projections et d’imaginations qui pouvait mener au populisme, au mensonge et à la démagogie (avis aux guignols genre Olivier Py)…
    Ce thème de l’honnêteté intellectuelle de l’engagement marxiste est passionnant, particulièrement en cette période de primaire de la gauche, entre un Peillon, tout droit sorti de sa Suisse où il s’en reclus, s’enivrant de mots dans une conférence de presse au point d’en être ridicule, tout comme Montebourg se gargarisant dans de grandes envolées lyriques  pour vanter un Made in France impossible…
    A voir donc, histoire de prendre un peu de recul avec des promesses un peu trop bien enveloppées et des discours un peu trop bien construits….