Faut-il rompre définitivement avec l’idée d’égalité ? Comme le rappelait Jérôme Tournadre-Plancq au Collège de France dans un séminaire de mars 2011 mis en ligne, la question a été au cœur du Parti Travailliste, lorsqu’il n’arrivait pas à émerger de l’opposition dans les années 90 en GB, avant l’arrivée en 94 de Blair au pouvoir …le Parti Travailliste recherchait alors une Troisième Voie entre gauche traditionnelle et droite et cherchait à porter un discours crédible pour un nouvel électorat ; la gauche anglaise sous l’ère Thatcher était plutôt synonyme d’assistanat et mobilisait surtout les citoyens les plus déshérités.
Gordon Brown pensait que l’égalité n’était ni désirable, ni faisable, et que la recherche permanente de l’égalité de résultats, par l’intervention de l’Etat, ne conduisait qu’à quelque chose de tyrannique, ne répondait pas aux aspirations des individus, plus portés vers la liberté et l’individualisme. Ainsi, selon les Travaillistes modernistes de l’époque, la redistribution des revenus entre les plus riches et les plus faibles, ne devait pas être considéré comme une fin en soi. L’inégalité, selon Brown, ne serait pas injuste, en particulier parce que doivent être prises en compte les aspirations des individus et leurs efforts en vue de se démarquer d’une masse uniforme. Ce qui va porter Tony Blair au pouvoir, c’est sa capacité à rassembler, à vendre l’idée d’appartenance à une communauté, où les individus ont une égale valeur et l’espoir de mise en place d’une société respectant l’égalité des chances. On accepte les inégalités matérielles, mais cela ne doit pas empêcher une compréhension mutuelle et un respect entre les uns et les autres. One Nation, one Communuty…Les inégalités sont acceptables à partir du moment où les individus sont à bord…ou vers une société de partenaires. Pour atteindre la cohésion sociale, il faut que chacun au cours de sa vie puisse se réaliser, selon Brown. Chacun doit être ce qu’il doit être et doit pouvoir atteindre ses buts, au cours de son existence. Il ne s’agit pas de compenser des inégalités, mais de prévenir, grâce en particulier à l’éducation. Mais, Brown n’ignorait pas que tous les individus ne partent pas de la même ligne. L’Etat ne doit donc pas se désengager, mais aider les individus à s’insérer dans la compétition économique. Mais comment compenser les inégalités face à la santé, face aux accidents de la vie, face aux problèmes de logements ? L’échec des Travaillistes et de Blair, puis de Brown lui même, va être causé par le fait que ces derniers ne vont pas s’intéresser assez aux exclus, à ceux qui ne peuvent monter « à bord », car trop en dehors du système….ils vont trop privilégier la méritocratie, ne pas s’intéresser assez à la politique de la ville et ils vont casser les représentations classiques gauche droite. Et le discours idéologique, assez brillant, assez bien mis en forme par des communicants, ne résistera pas aux réalités de la complexité économique et sociale. Ajoutez la guerre en Irak et les mensonges de Blair...Tout cela conduira au succès de la coalition actuelle, conservatrice et démocrate libérale.
Intéressant cette communication*….on devrait obliger tout prof. de lycée et d’université de + 10 ans d'experience à produire au moins 2 h de cours en ligne accessible à tous sur le net….car notre société est aussi en panne d’idée, endormie par la répétition médiatique de news en boucle…et que l’égalité des chances, ça passe d’abord par l’accès à la connaissance de qualité, pas si facile à trouver sur le net…et puis, ca créerait de l'émulation chez les profs...
* Même si je trouve que le fond est très discutable et un peu court...les buts que chacun veut atteindre sont fortement conditionnés par l'éducation et le milieu d'origine...on a les rêves de son milieu...l'égalité des chances est bien difficile à atteindre, selon moi...et je serai toujours ébahi par la manipulation des peuples par des idées souvent simplistes, encore qu'ici, dans le séminaire, le charisme et le talent d'orateur de Blair, important au debut, ne sont pas évoqués...