Cet après midi, je suis allé à la Cité de l’architecture voir l’exposition consacrée à Claude Parent. …et miracle, le maître était là, en chair et en os, faisant le guide pour une école d’architecture….enfin, le maître, il n’aime pas les gourous, le maître…il ne se gêne pas pour égratigner Le Corbusier et Picasso, « des gens géniaux, mais tellement dangereux, des tueurs », il préfère se qualifier de bonne pâte, le maître. Encore bon pied, bon œil (malin), avec son franc parler et toujours rebelle malgré ses 87 ans, Claude Parent, conte à son auditoire quelques anecdotes, comme celle-ci :
« un jour, dans mon agence, je confie à une jeune dessinateur le soin de faire des chiottes pour un projet. Cinq minutes après, je repasse et le type me dit qu’il avait fini, pour faire deux traits, il ne faut pas y passer la nuit qu’il me dit. Je l’ai engueulé, en lui disant qu’il n’ y avait rien de bête à faire des chiottes, des chiottes, c’est de l’architecture, et on peut exprimer sa créativité à faire des chiottes comme des placards, l’architecture commence dans les chiottes »… il faut toujours remettre en cause ce qui parait acquis, évident, trouver la faille, inventer d e nouveaux volumes, interroger les sens, mettre en mouvement, modifier les points de vue, continue le vieil architecte. Puis, il a évoqué ce qui a été sa marque de fabrique, l’oblique…prenez un cube et penchez le à 45°, vous ne savez plus où est l’intérieur et l’extérieur, ce qui est mur et plancher, vos yeux peuvent lire au sol des indications, le sol n’est plus seulement sol, etc…il faut sortir des sentiers battus, en France, on a du mal, regardez après guerre, on aurait pu en profiter pour construire des choses formidables, non, on a fait des briques les unes à côté des autres….et l’artiste, longtemps qualifié d’utopiste, est intarissable, allant de commentaires en commentaires autour de ses projets, exposés ici , jusqu’à début mai, dans un espace aménagé par celui qui fut son élève et qui dit lui devoir beaucoup, Jean Nouvel.
L’architecture est un combat quotidien, ca fait du bien d’entendre des hommes comme Claude Parent, en cette journée du stress au travail (quelle hypocrisie), où les rebelles sont bouffés par les financiers et les technocrates partisan du « pas de vague »…je suis reparti très heureux, merci Claude Parent pour cette leçon de vie.