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Sur la route...presque seul.

J’ai eu l’occasion d’effectuer une mission de formation auprès de chauffeurs de citernes de gaz liquide pour particuliers ou PME, il y a quelques années. Pas la mission dont je suis le plus fier, d’ailleurs, je me suis arrangé pour fuir assez vite ce qu’on avait appelé un peu pompeusement un projet de conduite du changement.

Le changement était de taille. En raison de normes européennes de sécurité sur le transport des matières dangereuses, on équipait les camions d’un système téléinformatique embarqué, connecté à un GPS, en relation permanente par téléphone portable avec un PC situé à la Défense, d’où il était possible de suivre quasiment au mètre près le trajet de la citerne.

Bien sûr, l’encadrement insistait sur les avantages de cette connexion, le chauffeur ne serait jamais seul, même perdu au fin fond de la campagne française un jour de mauvais temps, pour livrer une ferme isolée en plein hiver, pour trouver une cuve enterrée au fond d’un jardin avec de nouveaux propriétaires ignorant l’emplacement de la cuve,  ou lorsqu’un client mécontent ou à moitié fou, faisait une crise et menaçait de buter le livreur parce que le gaz a trop augmenté.

Mais pour ce même livreur, le système sonnait le glas des horaires aménagés, en faisant le boulot le matin pour avoir l’après midi de libre, le détour pour porter du pain à une grand mère ou le petit noir au routier du coin. Désormais, le contrôleur enverrait les tournées par télétransmission sur l’ordinateur embarqué, au dernier moment à 7 heures, les clients pouvant commander leur livraison par internet….flexibilité et service…le coordinateur de la Défense pourrait rajouter en fin de matinée une livraison supplémentaire pour satisfaire un grincheux, ou pourrait demander au chauffeur de justifier un itinéraire non prévu.

Quand à la livraison, fini le temps où le conducteur pouvait se faire offrir un verre par le client, chaque phase de remplissage étant minutée. Tu fais, quoi, là, ça fait trente minutes que t’as disparu…

J’imaginais le type avec sa remorque de plusieurs tonnes, se démenant sur un chemin verglacé, voyant le temps défiler et ayant encore trois clients à livrer avant la nuit, alors que la neige tombe à gros flocons…Bien sûr, un jour, à la retraite peut être, ils pourront raconter leurs aventures dignes d’une séquence du film Le salaire de la peur, à leurs petits enfants…on n’oublie souvent les plus mauvais moments….enfin, pour la liberté, il faut mieux oublier ce genre de métier.

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