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litterature - Page 7

  • Le Royaume - Le livre d'emmanuel Carrère

    Emmanuel Carrère, on l'imagine assez bien en parfait intello, fils de bonne famille, le parfait bobo, amoureux de cinéma, de culture, rat de bibliothèque et coureur de musées...le genre de mec qu'on croise à vélo un soir de Nuit Blanche.

    Dans son dernier bouquin, il ressort ses notes, ses notes très appliquées sur sa période « catho très pratiquant » qu'il a prises, quand il a traversé une grande période de déprime, en écrivant le livre sur Romand, le baratineur qui se faisait passer pour un toubib et qui avait tué toute sa famille, quand la vérité se faisait jour.

    Dans cet énorme pavé de plus de 600 pages, il décortique l'Evangile, prend le parti de l'apôtre Paul, puis de Luc, évangéliste et compagnon de Paul....Emmanuel se livre tour à tour à un travail d'historien et de critique,  il compare les versions, il s'en remet à Renan et sa relecture controversée de la biographie de Jesus .... 
    Carrère rapporte ces écrits et ces paraboles qu'on a oublié pour la plupart, qui paraissent totalement décalées, comme cette histoire de maître qui embauche des ouvriers à la vigne :
     - On convient du tarif : un denier à la journée. Les ouvriers commencent à travailler et le soir venu, le maître trouve sur la place des types qui traînent qui expliquent qu'ils n'ont pas de travail. Le maître les embauche et quand arrive la paie, il donne un denier à chacun, que l'on ait travaillé 11 heures ou une heure. Parce que les lois du Royaume ne sont pas les lois des hommes. Egalité, égalité ou alors, perversité à la Hollande "un contrat est un contrat"...Au mérite, au travail, à l'effort, Jésus semble toujours préférer les bandits, les prostituées, les filous. Un socialo de la première heure, en somme, doublé d'une bonne dose de manipulation, c'est bien ce que je dis, un vrai socialo ...
    Même chose avec l'accueil et l'hospitalité  . "Au lieu d'inviter tes amis, des parents, de riches voisins qui te rendront l'invitation, invite les pauvres, les aveugles, les mendiants, car eux ne te rendront pas et cela sera compté le jour de la Résurrection"...transposé aujourd'hui, c'est ouvrons les frontières en grand, quitte à perdre ton identité et tes certitudes de privilégié bien tranquille, et tu auras droit à la vie éternelle !!

    Arrivé vers la fin du bouquin, je n'en pouvais plus, les souvenirs du temps perdu passé à la messe et au catéchisme me revenaient....je me disais « ce Jesus, moi aussi j'aurai été d'accord pour le tuer, c'était un provocateur, un imposteur qui avait pour but de troubler l'ordre établi  et d'ailleurs, si on n'est dans un tel bazar aujourd'hui, il n'est pas étranger au bordel qu'il a mis dans la tête des gens depuis des siècles, à  mon avis, le Jésus, c'était un drôle de zigotto, un anarchiste qui n'aimait pas le pouvoir, la réussite, l'intelligence et qui tirait à lui tous les marginaux, histoire de déranger les élites et les bourgeois...et le Carrère, malgré toute ses belles démonstrations, il renforce en moi cette idée assez sombre que j'ai de la religion, qui me courre dans l'esprit depuis des années, où j'ai tourné le dos à mon éducation à L'Eglise, avec tous les regrets qui vont avec.

    Emmanuel Carrère dit ne plus être chrétien, mais ce n'est pas très clair son affaire. Page 354, il écrit en répondant à des amis qu'il croise  : « Mais alors finalement, vous êtes chrétien ou pas ?
    Je réponds non.
    Non, je ne crois pas que Jésus soit ressuscité, Je ne crois pas qu'un homme sois revenu d'entre les morts. Seulement, qu'on puisse le croire et l'avoir cru moi même, cela m'intrigue, cela me fascine, cela me trouble, cela me bouleverse.
    J'écris ce livre pour ne pas abonder dans mon sens. »

    Alors, on se dit « il est vachement tordu le Carrère »...

    Et puis, dans les dernières pages, il met le turbo...il raconte sa participation à une de ces récollections bien catho avec des sortes de Boutin, où on se lave les pieds mutuellement et où on se tient par la main pour réciter le Notre Père... il raconte comment, lui l'intello, fait la moue pour chanter avec les autres, quand il se fait entraîner par une handicapé et là, j'avoue qu'il nous trouble, il nous prend par les sentiments et il nous colle le doute ...il est fort l'Emmanuel, en tous cas, son livre ne ressemble à rien d'autre, c'est malin, c'est bien écrit, c'est construit comme une enquête d'un journal d'investigation, avec des images de cinéma.... et surtout, il arrive à nous faire partager ce qui dérange et bouscule nos certitudes...balaise !!!