Je connais bien Guediguian, dont j’ai vu pratiquement toute l’œuvre…pourtant là, je me suis senti pendant la première heure, étranger à ce film très français, partant dans tous les sens et voulant à tout prix délivrer un message. Pourtant, je sais que le réalisateur n’est pas si niais que son film pourrait le laisser croire, qu’il a perdu ses illusions communistes depuis longtemps, un peu comme son personnage interprété par Meylan, le Marius des origines, qui semble complètement désabusé, mais se remonte le moral en se repassant en boucle du Jean Ferrat…
Car cette pseudo fable est très sombre…on sent que tout est planté, même Marseille, sa ville fétiche, où l’insécurité rode, laissant ses habitants indifférents, comme blasés, aux vols à la tire et aux agressions…même Darroussin, qui reprend son rôle de taxi, comme dans la plus noire des productions d’Agat Films « La vile est tranquille » veut se passer la corde au cou, vu qu’il n’espère plus rien et que sa femme l’a planté … la mort naturelle aussi est proche, ça sent l’oraison funèbre, sur fond de Stabat mater, ça sent le vieux, qui contemple ses souvenirs sous plastique ou baignant dans le formol et qu’on finit par jeter définitivement à la mer…il ne reste plus grand-chose à quoi se raccrocher, si ce n’est la bouffe comme ces groupes du 3eme âge, qui oublient un moment leur solitude autour d’une assiette, sur un air de musette...allez, pépé, une dernière valse...même pas la satisfaction de laisser un monde meilleur aux générations futures… une fille déclare qu’elle préfère faire la pute que de bosser au supermarché, au moins on gagne du fric et on est libre, sans être prisonnière du mariage ou d’un patron…
Puis, dans les dernières minutes, Guediguian nous surprend : il faut essayer de vivre un dernier rêve, essayer ? non, réussir au moins cela, une fois, la dernière fois…on ne sait jamais, à force d’être pessimiste, on peut avoir une dernière surprise…malheureusement, de mon point de vue, le plan final est de trop, il fait retomber le souffle…décidemment...je crois que maintenant, je préfère Godard, de très loin, au moins, il n’a pas perdu ses provocations, comme pour dire au monde qu’il est encore vivant, lui… et puis, Godard, on sait qu'il ne roule que pour lui et son art, au moins c'est clair...