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Littérature - Page 16

  • Des Lisières à la Gueule Ouverte

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    Je viens de terminer le dernier roman d’Olivier Adam « Les lisières ». C’est un assez long bavardage d’un écrivain issu de famille modeste, revenant dans sa banlieue d’origine, pour accompagner la mort de sa mère.

    J’ai revu, à l’occasion, un film tourné par Maurice Pialat, en 1974, La Gueule Ouverte, qui traitait aussi de la mort de la mère, dans un village au fin fond de l'Auvergne des années 50,  vision autobiographique, d’un Maurice Pialat grandit aussi en banlieue, à Montreuil, confronté à un père tour à tour aimé et détesté.

    Une phrase prononcée par Nathalie Baye, qui faisait ses débuts au cinéma, interviewée en bonus de la ressortie du film en DVD en 2004, résume ce que je ressens comme la différence majeure entre les deux œuvres : Pialat filmait la vie au plus près, sans aucune fioriture, de manière physique, sans intellectualisation….et c’est ce qui donnait sa grandeur à un film qui fut pourtant un bide à sa sortie, en plongeant Pialat dans les dettes.

    Adam ne peut s’empêcher d’être cérébral, et cela peut agacer : « Il méprise tout le monde et il a tout compris », disent les Inrocks, à propos du livre. Pourtant, Adam décrit très bien la distance qu’un mec de banlieue ressent toujours dans sa vie, distance souvent aussi évoquée par une Annie Ernaux, toutefois plus « intégrée », en apparence. Le héros des Lisières n’est jamais bien : pas bien avec ses anciens potes avec qui il est en désaccord, mais en même temps, dont il se sent très proche, pas bien avec le milieu bourgeois, y compris de gauche, qui est le sien, ce monde qui vous juge à vos chaussettes et essaie toujours de vous coincer avec la question qui tue, pas bien avec sa famille, en particulier ce père, trop étriqué dans sa petite vie qui vote FN, pas bien, bien évidemment, avec ceux qui ont réussi et qui votent à droite, en épousant de plus en plus les thèses de la grande Blonde.

    Pialat a toujours été jugé comme un marginal bourru et lui-même a finit sa vie dans une grande solitude, mais en 74, on semblait s’accommoder davantage de son milieu d’origine et Pialat n’a jamais vraiment montré cette solitude existentielle décrite par Adam, question d’époque probablement.

    Car, les deux documents cités se terminent de la même manière : la fuite vers un ailleurs, après l’enterrement de la mère, comme ci l’un et l’autre des deux auteurs voulaient oublier, vivre autre chose au plus vite…..tout en faisant de leurs racines, l’essentiel de leur richesse et de leur oeuvre.